Nicolas Régnier est né à Maubeuge vers 1588 ou 1591 (l'année exacte reste incertaine). Très jeune, vers 1601, il part à Anvers où il devient l'élève d'Abraham Janssens van Nuyssen (1576-1632) qui l'initie à la technique picturale caravagesque. Ce style, appelé "manière sombre" dans les Flandres, avait été inventé par le célèbre peintre milanais Caravage (1571-1610). Certaines des oeuvres de Régnier maîtrisent tellement bien le style caravagiste qu'on les a parfois attribuées par erreur au Caravage lui-même. Ensuite, vers 1615 à 1617, on retrouve Nicolas Régnier à Parme où il se fait engager comme "serviteur" à la cour des Farnèse. Il y rencontre probablement le peintre caravagiste Lionello Spada (1576-1622), surnommé le "singe de Caravage". Vers 1617 - 1620, Régnier gagne Rome où il se retrouve colocataire de deux collègues caravagesques flamands : David de Haen (1602-1674) et Dirk Baburen (Théodore Van, 1590-1624). Il devient l'élève du grand maitre Bartolomeo Manfredi (1582-1622), qui lui apprend son interprétation personnelle du caravagisme : la "Manfrediana Methodus". La aussi, Régnier finit par tellement égaler son maître que, pour certaines de ses oeuvres, on ne sait pas auquel des deux peintres il faut les attribuer. Son caravagisme en devient plus raffiné ("Caravagisme de séduction"), se différenciant ainsi du style plus brutal des Caravagistes du nord. Régnier devient "provveditore allo studio" de l'Académie de Saint-Luc, puissante corporation des peintres et sculpteurs de Rome. Il est alors le protégé et le "peintre domestique" du Marquis Vincenzo Giustiniani (qui fut le mécène du Caravage). Il italianise alors son nom en "Niccolo Renieri" (il est connu aussi sous le nom de "Nicolo Rinier"). A Rome il rencontre Simon Vouët (1590-1649), un autre peintre caravagiste, qui sera plus tard l'introducteur de ce style pictural en France. Le 1er octobre 1623 Régnier / Renieri épouse Cecilia Bezzi et va habiter chez ses beaux-parents... Vers 1626 il part s'installer à Venise où il s'inscrit à la guilde des peintres de la ville. Il sera membre des "Fraglia dei pittoris" de 1626 à 1643. Il acquiert alors une certaine réputation comme portraitiste. Ironie de l'histoire, aucun de ses portraits ne nous est parvenu. En 1662 il formera un élève au dessin : le jeune Francesco Epis. Celui-ci ne laissera pas de traces dans l'histoire. En 1663 il est cité parmi les quarante et un peintres de renom actifs dans Venise, avec le titre élogieux de "pittore classico". L'influence du Bolonais Guido Reni, dit "Le Guide" (1575-1642), le pousse alors vers le classicisme, le nouveau style à la mode. Mais le talent de Renieri commence à s'essoufler. Son style s'adoucit, devient plus coloré et s'éloigne peu à peu du caravagisme pur, pour se tourner vers des scènes historiques et mythologiques d'une inspiration plus superficielle et insipide. De plus, Renieri devient expert, marchand d'art et collectionneur renommé. Il a le titre de "peintre du roi de France" depuis environ 1644, c'est à dire qu'il est un fournisseur, revendant des tableaux de sa collection à Mazarin. Renieri mourra dans l'aisance à Venise le 19 novembre 1667, âgé de 76 ans, sans être jamais revenu dans son pays natal. Après sa mort il tombera peu à peu dans l'oubli et sera considéré finalement comme un simple "peintre décoratif". Renieri avait quatre filles à qui il apprit son art de la peinture : Lucrezia, Clorinda, Angelica et Anna Isabetta. Réputées pour leur beauté, elles lui serviront aussi de modèles lors de sa période vénitienne. Lucrezia épousera le peintre flamand Daniel Van den Dyck (1610-1670) et Clorinda épousera le Vénitien Pietro della Vecchia (Pietro Muttoni, 1603-1678). Ce dernier était un peintre qui, parfois, jouait au faussaire et effectuait des copies et des pastiches d’après des peintres célèbres pour le compte de Renieri. Il semble donc que Renieri et son gendre versaient dans le trafic de faux tableaux. Ainsi on les soupçonne d'avoir vendu un faux Giorgione réalisé en 1643. Renieri avait un demi-frère utérin : Michel Desoubleay (Michele Desubleo), né lui aussi à Maubeuge et qui fut également un peintre caravagiste. Le style des deux artistes était parfois si semblable qu'on ne sait pas toujours auquel des deux attribuer certaines oeuvres. |